Nous décrétons l’état d’urgence culturelle.
Ferments essentiels de la démocratie, les politiques publiques de la culture sont furieusement attaquées par les intégristes du libéralisme et les fanatiques du marché. Elles le sont aussi par l’extrême droite qui cherche à installer son horizon populiste, nationaliste, autoritaire, masculiniste ou encore xénophobe.
Face à cela, il y a urgence à faire vivre dans la société un mouvement qui réunisse les citoyennes, les citoyens avec les créatrices et les créateurs, avec les acteurs sociaux et politiques, pour mettre à l’ordre du jour une grande ambition culturelle.
L’état des lieux
Les budgets ministériels sont indigents et ceux des collectivités sont massivement ponctionnés. Dans le prolongement d’une interminable phase de crise, c’est un grand plan de licenciement et de privation du droit à la culture qui se met en œuvre dans le pays. Mais le danger n’est pas uniquement budgétaire. Il s’exprime aussi par la volonté de plus en plus avouée de détruire les politiques culturelles, afin de faire place nette aux logiques marchandes, emballées dans du marketing et des faux-semblants. Il s’exprime par la volonté d’imposer une culture dominante au rabais, niant la vitalité populaire et conçue pour asservir. Il s’exprime par des logiques de surproduction de contenus, déjà décuplées par les mésusages de l’intelligence artificielle générative, qui font tourner la machine à clics et à cash, tout en occupant le temps et les cerveaux humains. Cette tendance lourde n’est pas séparée des offensives de l’extrême droite, toute entière occupée à censurer et altérer les imaginaires, avec le soutien de puissances financières toujours plus assoiffées de pouvoir.
Mais toutes ces attaques se heurtent à la vitalité et à la diversité d'une création artistique toujours vivace dans le pays et aux résistances du mouvement culturel, social et citoyen.
Le choix
Dans une humanité en crise, la culture est moins que jamais un luxe, elle est le feu dont nous avons besoin. Dans cette bataille culturelle, nous refusons de nous en remettre au seul marché. « Un peuple qui abandonne son imaginaire culturel à l'affairisme se condamne à des libertés précaires » , proclamait déjà la déclaration des Etats généraux de la Culture impulsés par Jack Ralite en 1987. C’est pourquoi nous combattons la réduction des moyens et la destruction d’une véritable ambition démocratique et républicaine pour la culture. Nous ne prenons pas acte. Nous revendiquons une nouvelle place pour la culture dans l’action publique : en son cœur.
Il n’y a pas d’épanouissement humain possible sans le geste de création humaine qu’il faut protéger, encourager et partager. Nous refusons qu’on nous prive de notre pouvoir imaginaire, de la puissance de la rencontre, des ressources du langage, de notre capacité à nous découvrir semblables et singuliers. Autant de choses si indispensables à vivre, à être libres, et à inventer l’avenir. Ce que nous défendons, en somme, c’est la dignité humaine.
L’action
Nous voulons installer un rapport de forces favorable à la création, aux arts, à l’éducation populaire, au service public, à la liberté et au pluralisme des médias…
Nous lançons un appel à toute la société pour changer le cours des choses et empêcher le sacrifice insensé qui se profile. Nous voulons que les enjeux culturels s’imposent dans les débats qui s’annoncent à l’occasion des échéances politiques locales et nationales à venir, mais notre ambition va bien au-delà, car nous savons que la culture est la condition du politique : nous voulons restaurer la possibilité de la rencontre, nous voulons faire grandir le goût de la liberté et du partage, nous voulons faire place aux dynamiques d’émancipation.
C’est pourquoi nous appelons à un foisonnement d’initiatives qui composeront de nouveaux États généraux de la culture, de la création, des arts, de l’éducation populaire et des médias ! Des États généraux de notre temps, en prise avec ses défis considérables. Des États généraux ouverts à toutes et tous, artistes, travailleurs et travailleuses de la culture, collectifs et structures, citoyennes et citoyens.
Nous proposons à tous ceux et celles qui partagent cette inquiétude, cette conviction, cet espoir, de signer cet appel. Nous leur proposons de s’emparer de ce label : Les nouveaux États généraux de la Culture, des arts, de la création, de l’éducation populaire et des médias ! Nous proposons d’engager une démarche ouverte, visible, sonore, où l’ambition culturelle se débat, se pense et s’agit ensemble.