Le Maire LR de Chalon-sur-Saône poursuit sa croisade. 

Une croisade médiatique.

Il y a quelques semaines, Gilles Platret dénonçait une « épuration ethnique » qui serait à l’œuvre, selon lui, dans certains quartiers chalonnais. Puis, en décembre, il s’offusquait très médiatiquement des « intrusions islamistes » dans les écoles de la commune, saisissant les autorités académiques. Que sait-il des motivations personnelles de cette femme voilée qu’il a foudroyée de son hydre ? Porter le voile est une décision intime qui peut aller au-delà de la piété et son port ne devient subversif que dans le regard de celui qui lui attribue un sens politique. Sur le plan légal, rien n’empêche cette maman d’accompagner une sortie scolaire vêtue d’un voile, et notre maire le sait bien puisqu’il préside les travaux de la commission laïcité de l’Association des maires de France. De la polémique, et rien d’autre.

Ensuite, il s’est fait remarqué en refusant de célébrer un mariage « douteux », jetant en pâture les concernés sur les réseaux sociaux. Le maire s’octroie ainsi des pouvoirs qu’il n’a pas et médiatise ses décisions par des informations fausses, démenties par le procureur. Mais le mal est fait, la polémique enfle encore et des commentaires aussi abjects que dangereux affluent depuis sur sa page Facebook.

De quelle croisade s’agit-il en fait ? D’une « reconquête » politique toujours plus à droite. Rien ne l’arrête, sans doute galvanisé par l’air ambiant, le voilà jouant de l’ambivalence dans une émission télévisuelle quant à un possible ralliement au mouvement d’Eric Zemmour.

Mais que cherche donc notre croisé de la Laïcité ? 

De plus en plus de Chalonnais sont lassés des saillies médiatiques de leur maire qui transpose à la vie locale les controverses polarisantes des débats nationaux sur la visibilité de l’islam dans l’espace public ou encore sur l’immigration. Croyants pratiquants, non pratiquants, non croyants, apostats, libres penseurs et autres concitoyens chalonnais, beaucoup en ont marre d’être les otages d’une parole publique outrageante et stigmatisante, marre de voir le débat démocratique confisqué par la « zemmourisation » et l’autoritarisme.

Toute cette gesticulation masque en vérité une gestion inégalitaire de la vie des administrés qui n’ont pas à faire les frais des ambitions idéologiques du Maire. Au lieu de garantir l’égalité républicaine à tous les enfants chalonnais, et donc les citoyens de demain, l’édile en méprise une partie ainsi que leurs parents.

Le drame survenu l’été 2018 durant lequel une fratrie de trois enfants a péri noyée dans le lac du quartier Saint-Jean devrait inciter à plus de vigilance et davantage de responsabilité à l’égard de la sécurité dans certains quartiers. Au quartier du Stade, dans le parc de deux hectares, il n'y a plus un seul jeu d'enfants. Le grillage le long du canal est béant à bien des endroits et présente des risques. Chacun peut mesurer l'état d'abandon dans lequel vivent les familles de ce quartier et ce depuis plus d'une vingtaine d'années. Le communautarisme a bon dos. C'est pour beaucoup un quartier de relégation dont le bureau de vote est régulièrement l'un des moins votants de France. Triste record. La république laïque, si chère à monsieur le Maire, ne peut tenir ses promesses d’égalité sans respecter l’égalité sociale.

Attaquer Gilles Platret sur son racisme, son islamophobie et son instrumentalisation de la Laïcité est un devoir républicain. Toutefois, ce n'est pas suffisant d'autant qu'il a une audience nationale que ses opposants n'ont pas dans les médias. Il serait pourtant intéressant de l’interroger sur la politique de la ville en direction des quartiers prioritaires, sur les actions de médiations sociales et culturelles menées, et vérifier si les missions de service public sont remplies auprès de TOUS les Chalonnais. Cela devrait être une préoccupation du Maire et de son équipe. Pour cela, il faut être sur le terrain, avoir des relais, faire l'expérience de l'altérité pour mesurer les discriminations sociales et les inégalités vécues par certains administrés. Ce n'est pas le cas. Son travail d’élu n’est pas fait.

Exigeons de Gilles Platret autre chose que des polémiques. Exprimons nos désaccords sur la manière récurrente qu’il a de stigmatiser certains chalonnais et chalonnaises en fonction de leur appartenance ethnoreligieuse. Refusons l’extrême-droitisation de ses prises de position publiques et l’instrumentalisation de la Laïcité. Ne laissons plus la haine et le mensonge prospérer dans notre ville.

 

Fait le 20 janvier 2022